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CMS scrute ses données à la recherche de la supersymétrie

Une nouvelle analyse des données de la deuxième période d’exploitation du LHC, s’appuyant sur des techniques de pointe, a permis à des scientifiques de CMS de regarder à nouveau certains éléments

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Collision candidate produisant deux quarks top et de nombreux jets reconstitués (cônes jaunes). Crédit : Collaboration CMS

La supersymétrie est une théorie séduisante qui propose une explication à certaines des questions en suspens de la physique des particules. Elle prédit que toutes les particules connues ont un « superpartenaire », un équivalent dans la supersymétrie ayant des propriétés quelque peu différentes. Par exemple, le quark le plus lourd du Modèle standard, le quark top, aurait pour superpartenaire le « squark top » (parfois appelé « stop »). En 2021, la collaboration CMS a analysé l’ensemble complet de données de collision récoltées entre 2016 et 2018 et a trouvé des indices suggérant qu’il pourrait contenir des squarks top. Ici, « pourrait » signifie qu’il y avait moins de 5 % de chance que les observations faites puissent correspondre à des données ne contenant que des particules connues. Au lieu d’attendre de nombreuses années que davantage de données soient récoltées, dans l’espoir de reproduire le comportement observé, la collaboration CMS a décidé d’analyser une nouvelle fois le même ensemble de données, à l’aide de techniques d’analyse perfectionnées.

Avec cette deuxième analyse, les scientifiques sont à la recherche de la production simultanée de paires de squarks top. Chaque squark top se désintègre en un quark top accompagné de plusieurs quarks ou gluons plus légers, qui forment ensuite des états liés, les hadrons, créant finalement des grappes de particules, que l’analyse reconstitue comme étant des jets. L’empreinte signature consiste donc en deux quarks top et une multitude de jets. Ce qui rend l’analyse si ardue, c’est qu’une empreinte très similaire est produite par l’un des processus du Modèle standard les plus communs : la production d’une paire de quarks top. La production de quarks top accompagnés de nombreux jets est un processus difficile à simuler avec précision ; pour avoir une bonne évaluation du bruit de fond correspondant, il faut donc l’estimer à partir des données observées.

Pour cela, il existe une méthode, fréquemment utilisée, appelée « méthode ABCD ». Elle requiert deux observables non-corrélées permettant de distinguer la signature du bruit de fond. Les données de l’ensemble peuvent être réparties en quatre régions (A, B, C et D) selon que la valeur de chaque observable ressemble à la signature ou au bruit de fond. Cette répartition détermine ainsi une région dominée par la signature, une région déterminée par le bruit et deux régions intermédiaires. La méthode ABCD se caractérise notamment par le fait que, en s’appuyant sur les probabilités mathématiques relatives aux événements indépendants, il est possible d’estimer le bruit présent dans la région dominée par la signature en utilisant uniquement les informations des autres régions. Quand on l’applique à la recherche de squarks top, cette méthode est toutefois rendue inopérante par le fait que toutes les variables simples sont corrélées. Pour résoudre ce problème, des scientifiques de CMS ont adopté une approche innovante s’appuyant sur des techniques d’apprentissage automatique de pointe, afin de déterminer deux variables ayant un niveau de corrélation minime. Ces variables sont ensuite utilisées pour répartir les données dans les quatre régions. L’image ci-dessous représente la corrélation entre les deux variables pour la signature et le bruit de fond, et montre que la signature se situe principalement dans la région A. 

Two dimensional plot showing the ABCD method event distribution
Distribution des signatures (en rouge) et du bruit (en gris) dans les quatre régions (A, B, C et D), définies en fonction de deux variables non corrélées (SNN1 et SNN2) ayant été déterminées à l’aide de l’apprentissage automatique. (Crédit : Collaboration CMS)

Grâce à cette méthode innovante, la collaboration CMS a pu prédire avec précision le bruit dominant dans cette analyse faite à partir des données observées, sans s’appuyer sur des simulations présentant de grandes incertitudes en matière de modélisation de la distribution des nombreux jets. Elle est ainsi parvenue à améliorer nettement la sensibilité de l’analyse. Si les indices de la signature repérés par l’analyse de 2021 avaient été réels, nul doute qu’ils auraient à présent été observés. Le fait qu’une telle signature n’ait pas été vue au cours de cette analyse suggère que, dans des scénarios supersymétrie bien précis, un squark top se désintégrant en quarks top et en jets doit avoir une masse supérieure à 700 GeV. Disposant maintenant d’une méthode d’analyse beaucoup plus sensible, les scientifiques attendent avec impatience d’analyser les données de la troisième période d’exploitation du LHC, afin d’aller de l’avant et de découvrir des réponses aux énigmes de l’Univers.

Pour en savoir plus, voir l’aperçu des analyses de la physique de CMS (en anglais).