Le programme de physique au-delà des collisionneurs (« Physics Beyond Colliders ») chapeaute plusieurs nouvelles propositions d'installations et d'expériences qui visent à utiliser l’infrastructure du CERN pour mener de nouvelles études. L’un de ces projets, en attente d’approbation et en discussion dans le cadre de la Stratégie européenne pour la physique des particules, est une installation qui utilisera les faisceaux du Supersynchrotron à protons (SPS). Dénommée « Beam Dump Facility » (BDF), il s’agit d’un arrêt de faisceau jouant le rôle de cible fixe de haute intensité.
La cible, située à 15 mètres sous terre, arrêtera le faisceau primaire de protons et produira en priorité des mésons charmés pour permettre aux scientifiques de mener des recherches sur la matière noire et le secteur caché. L’objectif est d'observer des particules hypothétiques à très faible interaction.
Cette cible de 1,5 mètre d’épaisseur sera capable d’absorber toute l’énergie du faisceau du SPS. Celui-ci devrait atteindre une puissance moyenne de 355 kW. C’est pourquoi l’installation BDF ressemble davantage à un arrêt de faisceau qu’à une cible fixe classique. Par ailleurs, la cible sera très dense afin de produire des hadrons lourds tout en arrêtant les particules plus légères.
Bien plus sophistiquée que les cibles existantes, l’installation BDF nécessitera un système complexe de blindage et de manipulation. La cible sera entourée d’environ 3 700 tonnes de blindage de fonte et d’acier. La cible et le blindage seront manipulés et maintenus par des robots.
Comment l’installation fonctionnera-t-elle ? Un faisceau de protons produit par le SPS sera transféré le long de la ligne existante vers un séparateur, qui dirigera par la suite le faisceau vers cette nouvelle cible dans la zone expérimentale nord. Une nouvelle caverne de jonction et une nouvelle ligne de transfert seront construits.
L'installation BDF permettra, entre autres, d’alimenter l’expérience SHiP (« Search for Hidden Particles »), qui vise à rechercher des particules à interactions extrêmement faibles faisant partie du secteur caché, ainsi que des particules de matière noire. En cas d’approbation, suite à une phase de conception technique et après cinq ans de construction, SHiP devrait pouvoir enregistrer ses premières données au plus tôt en 2028.
L’année dernière, l’équipe de BDF a testé un prototype de cible pour établir la faisabilité du projet. La cible a résisté à l’impact du faisceau et s’est comportée comme prévu lors de la simulation. Les résultats des simulations ont ainsi été confirmés, donnant l'assurance que les caractéristiques requises peuvent être correctement simulées et atteintes.