Tout porte à croire que la matière noire existe et est omniprésente dans le cosmos ; pourtant, toutes les recherches de particules hypothétiques qui pourraient constituer cette forme invisible de matière sont, à ce jour, restées infructueuses. Les scientifiques ont donc décidé d'élargir leur filet et de rechercher le plus de types de particules possibles, de nouvelles régions où ces particules pourraient se cacher et de nouvelles manières de les étudier. L'expérience NA64 a désormais élargi le champ de ses recherches, avec la quête d'axions et de particules de type axion, à savoir des particules hypothétiques qui pourraient jouer un rôle dans l'interaction entre la matière noire et la matière visible, voire constituer la matière noire, selon leurs propriétés exactes.
L'équipe de NA64 a ciblé une zone encore inexplorée pour la recherche d'axions et de particules de type axion : un intervalle dans la zone bidimensionnelle de valeurs possibles pour leur masse et leur force d'interaction avec une paire de photons. Cet intervalle n'inclut pas les régions où les axions et les particules de type axion pourraient constituer la matière noire, mais on y trouve une zone où les axions pourraient expliquer l’énigme des propriétés de symétrie de la force forte, raison d’être initiale de la théorie postulant l’existence des axions, ainsi qu'une zone où des particules de type axion pourraient être porteuses de l'interaction entre la matière noire et la matière visible.
Pour étudier cet intervalle, l'équipe de NA64 a utilisé un faisceau d'électrons porté à une énergie de 100 GeV, provenant du Supersynchrotron à protons, et l'a dirigé sur une cible fixe. Elle a ensuite cherché les axions et les particules de type axion qui seraient produites dans les interactions entre les photons de haute énergie générés par les électrons de 100 GeV dans la cible et des photons virtuels provenant des noyaux atomiques de la cible. Il s’agissait, soit de trouver des traces de la transformation, ou « désintégration », de ces particules en une paire de photons, dans un détecteur situé juste après la cible, soit de repérer l'énergie emportée par ces particules si elles se désintègrent en aval du détecteur.
L'équipe de NA64 a analysé les données collectées sur une période de trois ans, entre 2016 et 2018. Au total, ces données correspondent à quelque trois cent milliards d'électrons frappant la cible. Aucun axion ni aucune particule de type axion n'a été trouvé dans ces données, mais ce résultat a permis aux scientifiques de fixer des limites aux valeurs possibles de la force d'interaction entre les axions ou particules de type axion et deux photons, pour des masses inférieures à 55 MeV.
« Nous sommes très heureux que NA64 vienne rejoindre le club des expériences qui traquent les axions et particules de type axion, qui sont les candidats les plus prometteurs pour porter une nouvelle force d’interaction entre la matière visible et la matière noire, a déclaré Sergei Gninenko, porte-parole de la collaboration. Petit à petit, ensemble, ces expériences cernent de façon de plus en plus précise le territoire à étudier pour trouver, peut-être, ces particules. »