Les étoiles à neutrons dans l’Univers, les gaz atomiques ultrafroids en laboratoire et le plasma quarks-gluons produit par les collisions de noyaux atomiques au Grand collisionneur de hadrons (LHC) : des objets bien différents, et pourtant, ils ont quelque chose en commun. Tous trois sont un état de la matière semblable à un fluide fait de particules soumises à l’interaction forte. En savoir plus sur les propriétés et le comportement de l’un de ces liquides presque parfaits pourrait se révéler essentiel pour notre compréhension de la nature à différentes échelles, éloignées de plusieurs ordres de grandeur.
Dans un nouvel article, la collaboration CMS communique les mesures les plus précises obtenues à ce jour sur la vitesse à laquelle se déplace le son dans le plasma quarks-gluons, apportant un nouvel éclairage sur cet état extrêmement chaud de la matière.
Le son est une onde longitudinale qui se propage dans un milieu en produisant des compressions et des dilatations de la matière qui suivent la même direction que son mouvement. La vitesse du son dépend des caractéristiques du milieu traversé, telles que sa densité et sa viscosité. Le son peut donc être utilisé pour sonder un milieu.
Au LHC, le plasma quarks-gluons se forme quand des ions lourds entrent en collision. Lors d’une collision, pendant une infime fraction de seconde, une gigantesque quantité d’énergie est produite dans un volume qui n’excède pas la taille d’un noyau d’atome. Les quarks et les gluons libérés à cette occasion se déplacent au sein de cet espace, formant un état de la matière semblable à un fluide, dont la dynamique collective et les propriétés macroscopiques sont bien décrites par la théorie. La vitesse du son dans ce milieu peut être mesurée de deux façons : à partir de la vitesse à laquelle la pression change sous l’effet des variations de densité d’énergie, ou bien à partir de la vitesse à laquelle la température change sous l’effet des variations d’entropie (l’entropie étant une mesure du désordre dans un système).
Lors les collisions d’ions lourds, l’entropie peut être déduite à partir du nombre de particules chargées électriquement qui sont émises à cette occasion. La température, quant à elle, peut être déduite à partir de l’impulsion transversale moyenne de ces particules (c’est-à-dire l’impulsion transversale par rapport à l’axe de collision). À l’aide des données collectées lors des collisions plomb-plomb à une énergie de 5 020 milliards d’électronvolts par paire de nucléons (protons ou neutrons), la collaboration CMS a mesuré pour la première fois comment la température varie avec l’entropie lors des collisions centrales d’ions lourds ; il s’agit de collisions dans lesquelles les particules entrent en collision frontalement et se superposent presque entièrement.
Ces mesures ont permis aux scientifiques d’obtenir une valeur d’une précision record pour la vitesse du son dans ce milieu, qui correspond à près de la moitié de la vitesse de la lumière : exprimée dans l’unité de mesure de la vitesse de la lumière, la vitesse au carré du son est de 0,241, avec une incertitude statistique de 0,002 et une incertitude systématique de 0,016. À l’aide de l’impulsion transversale moyenne, ils ont également pu déterminer que la température effective du plasma quarks-gluons est de 219 millions d’électronvolts (MeV), avec une incertitude systématique de 8 MeV.
Les résultats concordent avec les prédictions théoriques et confirment que le plasma quarks-gluons se comporte comme un fluide fait de particules porteuses d’énormes quantités d’énergie.
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